mi viene il dubbio che siano stati leghisti oppure consiglieri della regione Lazio voi che dite ?
Il vit dans un mobil-home, ses voisins lui construisent une maison
C’est une histoire comme on en voit dans les émissions de téléréalité, sauf que la télé n’est pas venue. Une histoire de solidarité et de proximité qu’on peut lire, aussi, comme un contre-pied à la crise. L’histoire d’un père de famille vivant seul dans un mobil-home d’un autre âge et à qui ses voisins vont construire une maison. Une vraie maison en ossature de bois et aux normes "bâtiment basse consommation", avec trois chambres, 90 m2 de surface au sol et un poêle canadien au milieu. Sauf imprévu, la masure se dressera à Noël à la sortie du village de Saint-Martin-des-Fontaines (Vendée), à l’endroit même où Fred –l’homme ne souhaite pas voir apparaître son nom – a acheté un terrain pour se rapprocher de la mère de ses quatre enfants dont il est séparé.
Fred a 47 ans, une jolie paire de bacchantes et est originaire de l’Oise, où il exerçait le métier d’électromécanicien avant que tout bascule. C’était en 2006: un divorce l’éloigne de ses enfants dont il obtient la garde un week-end sur deux. Deux ans plus tard, son ex-épouse décide d’aller vivre en Vendée. Presque au même moment –"malheureusement et heureusement", dit-il –, il se fait licencier de l’entreprise où il était chargé de l’entretien des machines-outils. Il suit le mouvement, direction le bocage, pas le choix : "En restant dans l’Oise, je n’aurais vu les enfants qu’une fois par an", explique-t-il. Si l’aîné, aujourd’hui âgé de 23 ans, vit sa vie de chauffeur routier, les autres – deux garçons et une fille de 8 à 14 ans – ont besoin de leurs deux parents. Et réciproquement.
Les trois premiers mois, Fred les passe dans un camping-car installé dans la cour de la maison de son ex-femme, dans le village d’Auzay. Comme le bonhomme a quelques économies, il acquiert un joli terrain de 3.600 m2 à 16 kilomètres de là, à Saint-Martin-des-Fontaines, 160 habitants. Le prix de vente – 32.000 euros – lui paraît tout à fait acceptable, pour lui "qui vient de Paris" comme on dit au village. Il est en réalité bien supérieur à la moyenne du marché… Peu importe, son idée est de "faire construire", ce qu’il a déjà fait deux fois dans le passé : "Venir ici était comme prendre un nouveau départ dans la vie. J’étais alors loin de penser que j’en arriverais là." Fred a oublié un élément essentiel : l’emploi est une denrée rare dans ce sud vendéen saigné à blanc par les fermetures d’usines (SKF en 2009, Plysorol cet été). Il trouve un job dans une entreprise de maintenance agricole, devient maçon, travaille dans une ferme, et vivote avec les Assedic entre deux CDD. Il achète également des poules et des moutons, pour sa consommation personnelle.
Entre-temps, Fred a fait "rapatrier" sur place son vieux mobil-home, une antiquité de 27 m2 dans lequel il accueille ses enfants pendant le week-end. La vie y est heureuse mais spartiate, surtout les nuits de grand froid quand le poêle à bois peine à diffuser une chaleur constante en raison de l’absence d’isolation. Réglementairement, ce type de chauffage est interdit dans une habitation mobile. Tout aussi réglementairement, un mobil-home ne peut rester plus de trois ans au même endroit. Fred en est à son quatrième hiver sur place : il suffirait de pas grand-chose à une autorité vaguement sourcilleuse pour le faire expulser de son gourbi ambulant.
Sauf que voilà, Fred a des voisins. Des voisins pas comme les autres, sans doute. En face de chez lui, habite Bernard Anonier, un céréalier à la retraite, et quelques mètres plus loin Pierre-Alain Petit, un salarié de l’usine de briques située à l’autre bout du hameau. Le premier préside une association composée majoritairement d’agriculteurs ; le second tient en parallèle un bistrot appelé La Coussotte, où siège une autre association dont le but est d’organiser la brocante annuelle du village.
Fred, qui a le contact facile, a sympathisé avec ses voisins. Ceux-ci vont lui rendre son amitié, en… s’inquiétant pour lui. Notamment en 2010 quand la tempête Xynthia fait décoller le bord de son mobil-home de plusieurs dizaines de centimètres. Idem lors du glacial hiver 2011-2012 : "En me levant le matin, la première chose que je faisais était de vérifier que son poêle était bien allumé", en tremble encore Bernard Anonier. Plusieurs fois, Fred utilisera son sèche-cheveux pour dégeler la porte de son logis de bric et de broc.
Ce même hiver, à Saint-Christophe-du-Ligneron, une commune du nord du département, un drame fait la "une" des journaux : un père et son fils périssent dans l’incendie de leur mobil-home. "Cela a été le déclencheur, poursuit Bernard Anonier.On s’est rendu compte qu’il y avait chez nous le même potentiel de catastrophe. Et même pire encore. Imaginez : un vieux mobil-home avec un poêle à bois et trois enfants dedans ! On était dans une situation de non-assistance à personne en danger." La dégradation de la situation financière de Fred – acculé par un découvert de 1.400 euros et plusieurs impayés – ne laissait entrevoir aucun espoir de changement, sinon radical : "Avec le risque d’expulsion qui pesait sur lui, il sentait bien que la prochaine étape serait la “boîte en carton”, comme il disait pour expliquer qu’il redoutait de devenir SDF."
Pas d’hésitation : les deux associations décident de s’unir dans le but de construire une maison à Fred. La première, qui sommeillait depuis dix ans, a conservé un petit trésor de guerre (20.000 euros), reliquat de l’époque où elle organisait des championnats du monde de moissonneuses-batteuses. La seconde, en revanche, n’a plus un centime en caisse à cause de la pluie qui a gâché la brocante du village en 2011. Tout cela étant bien maigre, un dossier est envoyé à l’émission de TF1 "Tous ensemble", version française du programme américain "Les Maçons du cœur". "La production nous a appelés deux fois mais elle n’a pas donné suite", explique Bernard Anonier.
Privés de télé, la confrérie des voisins –une douzaine de personnes – va alors contacter des PME des environs, et miser sur la seule stratégie possible : le système D. Les débuts sont hésitants. Ici comme ailleurs, la crise est dans la bouche de tous les artisans et entrepreneurs dont la priorité est de maintenir leur niveau d’activité, pas d’aider quelqu’un qui galère. Mais certains vont jouer le jeu. Assez vite, tel fournisseur accepte d’offrir la structure en béton de la maison, et tel autre les planches d’épicéa nécessaires à la construction des parois. Un chef de chantier propose de superviser bénévolement les travaux, des peintres iront donner un coup de pinceau pendant le week-end. Une enseigne de Fontenay-le-Comte promet de livrer un plein camion de meubles et un paysagiste de planter 250 bulbes dans le jardin. Relayé par le quotidienOuest-France, le projet se transforme en chaîne de solidarité.
Au final, une cinquantaine de partenaires financeront en dons et en services 80% de l’opération dont le coût avoisine les 100.000 euros. "Curieusement, ce sont surtout de jeunes entrepreneurs qui ont mis la main au portefeuille, indique Bernard Anonier. Leur geste est très beau en cette période de crise. C’est à se demander si la solidarité n’est pas plus importante quand les temps sont difficiles."
Tout, néanmoins, ne va pas être un long fleuve tranquille. Au village, Fred a aussi appris à composer avec les regards obliques. "Sa présence a créé une gêne. Comme un sentiment de honte devant quelqu’un en détresse qu’on ne sait pas comment soutenir", glisse une habitante. "Pourquoi l’aider, lui, alors qu’il n’est pas originaire du village" est une phrase qui a, semble-t-il, pas mal circulé dans le bourg. Mobil-home oblige, certains ont également vu en lui un membre de la communauté des gens du voyage. "Fred, c’est un peu le Rom du pays, dit Bernard Anonier. Les Roms, soit on les expulse, soit on les garde. Nous, on a décidé de le garder. Et ce que nous aimerions beaucoup, maintenant, c’est que d’autres personnes montent des projets similaires ailleurs. Car des gens en difficulté, ce n’est pas ce qui manque."
En juin, la mairie lui a proposé un logement, mais Fred n’a pas rempli le dossier, craignant de ne pouvoir assumer le loyer de 380 euros. Sa demande de permis de construire a en revanche été acceptée, mais le conseil municipal s’est opposé à payer le prolongement du tout-à-l’égout jusqu’à son terrain (5.600 euros). "Cela aurait créé un précédent, justifie le maire, Roger Hervé (sans étiquette). Des cas sociaux, il y en a d’autres sur la commune. Si on commence à donner à quelqu’un, tout le monde demandera la même chose. Nos moyens ne nous le permettraient pas."
Et Fred, qu’en pense-t-il, lui ? Derrière ses moustaches, le gaillard cache difficilement sa gêne : "Cette maison ne sera jamais la mienne. Ce sera celle de mes enfants et la “leur”, mais je laisserai toujours la porte grande ouverte", dit-il. Avant cela, il a fallu le convaincre, ce qui ne fut pas une mince affaire, comme s’en souvient Pierre-Alain Petit, l’autre cheville ouvrière du projet: "Fred est quelqu’un qui dit n’avoir besoin de rien et qui ne veut pas qu’on l’aide. Résultat : j’ai dû lui rentrer dedans !" C’était au comptoir de La Coussote, un soir de mars. "Tu es un dur, mais je te ferai chialer. Avant six mois, tu auras une grosse surprise", avait tonné le patron des lieux. Fred a fini par craquer, comprenant qu’on ne lui racontait pas d’histoire.
Les premiers travaux devraient commencer ces prochains jours et durer jusqu’en décembre. Le vieux mobil-home ne sera démonté qu’au dernier moment et jeté à la benne. Fred conservera son châssis métallique pour le recycler en barbecue géant. A Noël, cette année, ce sera méchoui pour tout le monde.
Pour prendre contact avec les deux associations de Saint-Martin-des-Fontaines: un.toit.pour.une.famille@gmail.com